À Montréal, dans certains quartiers, il y a une caméra de surveillance pour 28 habitants et la ville compte actuellement 236 policiers pour 100 000 habitants. C’est 22 % de plus qu’à Toronto et 20 % de plus que dans l’ensemble des grandes villes canadiennes. Pourtant selon Statistique Canada l’Indice de criminalité sur l’île de a été réduit de moitié depuis l’an 2000.
Des citoyens inquiets
Plusieurs citoyens s’inquiètent de la prolifération de ces caméras de surveillance qui, depuis une douzaine d’années, envahissent l’espace public montréalais. C’est ainsi que Marco Sylvestro, un citoyen de Pointe-Saint-Charles a localisé «250 caméras installées sur des édifices, des feux de circulation, des commerces ou des entreprises. Si on suppose qu’un nombre équivalent est aussi installé à l’intérieur des commerces, des HLM et des stations de métro, on arrive à 500. Pour un quartier de 14 000 habitants, cela donne une caméra pour 28 habitants, un chiffre similaire à la Grande-Bretagne, reconnue comme ayant l’un des plus hauts taux de caméras au monde. C’est sûr que ça peut être utile pour les enquêtes policières ou pour prévenir certaines incivilités, mais ça entretient aussi une culture d’anxiété, alors que le niveau de criminalité est en diminution constante», précise-t-il. Pour sa part, Christian Bourdeau professeur à l’École nationale d’administration publique, se demande si nous n’assistons pas «à la mise en place graduelle d’une infrastructure de “surveillance totale” des lieux publics? Comment surveiller et encadrer le déploiement de caméras de surveillance toujours plus nombreuses, intelligentes et interconnectées pour éviter les dérives possibles?» Le seul moyen serait sans doute de resserrer les règles et de prendre des sanctions.
Le Québec est-il devenu un état policier ?
Dans une démocratie où les gens sont libres d’afficher leurs convictions, la question peut paraître incongrue, pourtant plusieurs militants sont inquiets. Déjà en 2015 la Ligue des Droits et Libertés, dénonçait les 7000 arrestations de masse effectuées principalement sur le territoire montréalais ce qui a entraîné l’ONU à se pencher sur le sujet et à produire deux rapports critiques publiés par le Comité des droits de l’Homme des Nations unies.
Francis Villeneuve, de l’Association des juristes progressistes, rappelle également que ces dernières années plusieurs règlements abusifs ont été adoptés par le législateur pour justifier des arrestations et brimer le droit de manifester. «Heureusement, la Cour supérieure a déclaré à la fin de 2015 que l’article 500.1 du Code de la sécurité routière, interdisant de manifester de manière à entraver la circulation, est invalide et contraire aux libertés d’expression et de réunion pacifique. Quant au règlement P-6, qui oblige notamment de donner son itinéraire à l’avance, on a bon espoir qu’il soit jugé inconstitutionnel en Cour supérieure», a-t-il conclu. L’usage excessif de la force policière lors des arrestations musclées inquiète également La ligue des droits et libertés. Le journaliste Mathias Marchal rapporte en effet que cet organisme «a recensé 55 événements de ce type depuis 4 ans. Ces arrestations avec usage excessif de la force ont abouti dans 83 % des cas à un retrait des accusations ou à des acquittements quelques années plus tard, ce qui fait dire aux manifestants visés qu’ils font l’objet de profilage politique».
Références :